Si ces dernières années ont vu les attaques ciblant des entreprises industrielles croître[1], cette croissance adopte depuis quelques semaines une trajectoire exponentielle. Dans un contexte global de montée de la menace, les entreprises industrielles apparaissent comme des cibles de choix et font face à la multiplication d’outils conçus spécifiquement pour viser leurs systèmes OT (Operational Technology).
Parmi les attaques recensées, on peut noter le ransomware qui a paralysé en février 2020 une installation de compression de gaz naturel maintenue anonyme. Selon le CISA qui est intervenu auprès de cette entreprise, l’attaquant est entré dans le réseau au travers d’une campagne de Spearphishing sur le système d’information de l’organisation. Une fois l’accès gagné, un ransomware non identifié a été déployé sur les deux réseaux, à savoir IT (Information Technology) et OT. N’ayant plus la possibilité « lire et d’agréger les données opérationnelles en temps réel », et les besoins en disponibilité et en traçabilité étant importants, il a été décidé d’arrêter les opérations pendant environ 2 jours. Une perte de productivité et un impact financier ont été déplorés.
Plus récemment, en lien avec la Guerre en Ukraine, de nouveaux outils d’attaque ciblant les systèmes OT, et particulièrement les systèmes de contrôle industriels (ICS), ont fait leur apparition. Parmi ces Advanced Persistent Threat (APT), on peut citer INCONTROLLER (alias PIPEDREAM), qui vise les dispositifs d’automatisation des machines et de contrôle de surveillance et d‘acquisition de données (SCADA) sur les systèmes OT, notamment les automates programmables de Schneider Electric et d’Omron.
Cet ensemble d’outils semble avoir des capacités de perturbation, de sabotage voire de destruction physique. La capacité d’attaque de ce package d’outils sur mesure est semblable à celle des malwares TRITON, STUXNET, et INDUSTROYER qui était à l’origine de la panne de courant en Ukraine en 2016 et dont une nouvelle version émerge (INDUSTROYER 2).
INCONTROLLER est composé de trois outils principaux : TAGRUN, CODECALL et OMSHELL.
Outil | Description | Capacités |
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TAGRUN | Recherche les serveurs OPC (Open Platform Communication), énumère la structure/les balises OPC, compromet les informations d’identification par force brute et lit/écrit les valeurs des balises OPC. |
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CODECALL |
Framework communiquant à l’aide de Modbus (protocoles industriels courants) et Codesys. Interagit, scanne, et attaque des PLC de la marque Schneider Electric. |
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OMSHELL | Framework permettant l’intégration et l’analyse sur certains automates Omron. |
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Ces outils sur mesure permettent à l’attaquant d’envoyer des commandes personnalisées via les protocoles réseaux industriels (OPC UA, Modbus, Codesys) afin de de couper les connexions et d’obliger une nouvelle authentification de l’utilisateur, de faire du déni de service, etc. Associés à deux outils supplémentaires en cours d’analyse, INCONTROLLER peut être utilisé pour mener une attaque sur les systèmes Windows sur les environnements IT et/ou OT (exploitation de la CVE-2020-15368 et d’une porte dérobée).
L’impact potentiel de ces attaques dans le monde réel, leur caractère tangible et facilement corrélable à des pertes (humaines et financières) en font des outils de plus en plus intéressants pour différents types de groupes (états, criminels, hacktivistes). Cet intérêt accru se traduit par une montée en compétence des attaquants, visible à travers l’exploitation de protocoles purement industriels mêlée à des attaques sur des systèmes IT, et explique l’augmentation significative d’attaques graves déplorées sur des systèmes industriels.
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